yoki
2007-02-27 02:28:28 UTC
http://dendanskeforening.dk/side1-cid-1-aid-1517-mid-1-params-2.html
En Europe, le philosophe français Pascal Bruckner est un des critiques les
plus durs du 'multi-culturalisme', sans aucun doute.
L'année passée, il publiait le livre controversiel 'La tyrannie de la
pénitence', où il traite l'auto-haine 'masochiste' de l'ouest.
'Le multi-culturalisme a son origine dans une anthropologie
anti-impérialiste demandant l'égalité de toutes les cultures, afin de
sauvegarder la co-existence paisible entre les groupes de population
d'origines culturelle et ethniquement différentes.
Dans le multi-culturalisme, chaque groupe de population a ses propres
caractéristiques et légitimité de soi-même, qui forment la base de son
droit d'existence et conditionnent son interaction avec les autres.
Des critères comme la justice et l'injustice, criminalité et barbarie
disapparaissent derrière ce critère absolu: le respect de la différence.
Il n'y a plus de vérités éternelles, et si nous conservons une foi, nous
ne souffrons que de quelque naif ethno-centrisme occidental.'
Pascal Bruckner le considère une différence si on reconnaît le droit des
citoyens de fond ethnique/religieusement différent d'avoir leurs propres
convictions et rituels, ou si on accepte que des sociétés
minoritaires et mal intentionnées érigent des murs entr'elles et la sociétéEn Europe, le philosophe français Pascal Bruckner est un des critiques les
plus durs du 'multi-culturalisme', sans aucun doute.
L'année passée, il publiait le livre controversiel 'La tyrannie de la
pénitence', où il traite l'auto-haine 'masochiste' de l'ouest.
'Le multi-culturalisme a son origine dans une anthropologie
anti-impérialiste demandant l'égalité de toutes les cultures, afin de
sauvegarder la co-existence paisible entre les groupes de population
d'origines culturelle et ethniquement différentes.
Dans le multi-culturalisme, chaque groupe de population a ses propres
caractéristiques et légitimité de soi-même, qui forment la base de son
droit d'existence et conditionnent son interaction avec les autres.
Des critères comme la justice et l'injustice, criminalité et barbarie
disapparaissent derrière ce critère absolu: le respect de la différence.
Il n'y a plus de vérités éternelles, et si nous conservons une foi, nous
ne souffrons que de quelque naif ethno-centrisme occidental.'
Pascal Bruckner le considère une différence si on reconnaît le droit des
citoyens de fond ethnique/religieusement différent d'avoir leurs propres
convictions et rituels, ou si on accepte que des sociétés
restante.
Partout en Europe d'aujourd'hui, c'est un sujet très actuel.
L'aile gauche européenne, y comprise celle du Danemark, souffre de cette
adaptation peu critique, ainsi contribuant au 'racisme des anti-racistes'
ou une nouvelle forme de 'apartheid'.
Pour Bruckner, la chose décisive est la liberté de l'individe.
Il soutient des rebelles mahométans seulement si leur objectif est de
conserver la liberté.
'Le paradoxe du multi-culturalisme est qu'il donne les mêmes droits à de
toutes sortes de communautés ethno-religieuses, mais pas aux individes. A
ces individes, on leur refuse la liberté de se dégager de leurs
traditions.
Derrière la reconnaissance du groupe, il y persiste l'oppression de
l'individe.'
Permettez-moi de signaler la polémique, stimulante, qui a agité la presseL'aile gauche européenne, y comprise celle du Danemark, souffre de cette
adaptation peu critique, ainsi contribuant au 'racisme des anti-racistes'
ou une nouvelle forme de 'apartheid'.
Pour Bruckner, la chose décisive est la liberté de l'individe.
Il soutient des rebelles mahométans seulement si leur objectif est de
conserver la liberté.
'Le paradoxe du multi-culturalisme est qu'il donne les mêmes droits à de
toutes sortes de communautés ethno-religieuses, mais pas aux individes. A
ces individes, on leur refuse la liberté de se dégager de leurs
traditions.
Derrière la reconnaissance du groupe, il y persiste l'oppression de
l'individe.'
internationale, entre d'une part l'essayiste Pascal Bruckner, partisan du
modèle d'intégration français ("Fundamentalismus der Aufklärung oder
Rassismus der Antirassisten?", http://www.perlentaucher.de/artikel/3594.html
; version anglaise : http://print.signandsight.com/features/1146.html ;
résumé dans Le Monde, ci-dessous) ; et face à lui Ian Buruma ("Freedom
cannot be decreed", http://www.signandsight.com/features/1161.html) et
Timothy Garton Ash ("Better Pascal than Pascal Bruckner",
http://www.signandsight.com/features/1166.html), lesquels avaient traités la
députée libérale néerlandaise Ayaan Hirsi Ali de "fondamentaliste des
Lumières". Voilà, comme si pour nos postmodernistes on pouvait renvoyer dos
à dos chacune des parties, tenants des droits de l'homme et fanatiques
religieux (qui croient tous deux en des valeurs universelles).
Pour Bruckner, réserver aux islamistes des plages (en Italie) ou des
hôpitaux (à Rotterdam), est quelque chose d'inacceptable, de l'ordre de la
ségrégation.
Et de soulever une question : comment l'Occident civilisé doit-il résister à
l'islam ? Comment faire pour coexister avec des populations musulmanes
toujours plus nombreuses ? A la manière française, qui ne conçoit le progrès
des droits de l'homme que dans le recul des religions, ou à la mode
anglo-saxonne, où la puissance publique est bienveillante à l'égard de
toutes les formes de croyance appelées à coexister pacifiquement ?
Paul Cliteur pense que cette position est suicidaire, que la tolérance à
l'égard des intolérants ne les apaisera pas mais leur permettra au contraire
de faire avancer leur agenda (inégalité hommes/femmes etc.) :
"What worries me about this relativistic - or rather, nihilistic -
position is that it makes Western societies easy prey for the ideology of
radical Islamism. If Western societies think they have no core values
important enough to fight for (by peaceful means), then there is no reason
for immigrant minorities to accept them. If the dominant ideology in Western
societies is that democracy, the rule of law, and human rights have no
specific quality that makes them superior to theocracy, dictatorship, and
authoritarianism, there is no need to oppose the radical assault directed at
Western democracies by the teachers of hate. Postmodern-value relativists
not only deny the superior quality of Western values but even contest that
people may defend those values against the assault that is being made on
them. Demonizing every criticism on religious mentalities as "polarizing"
and "provocation" denies even the right to defend democratic institutions.
That would be a suicidal position."
(http://www.signandsight.com/features/1174.html)
=> http://www.signandsight.com/features/1167.html
Lire les contributions :
- Necla Kelek (allemande, qui est d'origine turque), "Mr Buruma's
stereotypes" : http://www.signandsight.com/features/1173.html
- Paul Cliteur, "Falling prey to relativism" :
http://www.signandsight.com/features/1174.html
- Ian Buruma, "The dogmatism of Enlightenment" :
http://www.signandsight.com/features/1183.html
- Lars Gustafsson, "The logic of tolerance" :
http://www.signandsight.com/features/1205.html
- Stuart Sim, "Don't blame the postmodernists" :
http://www.signandsight.com/features/1216.html
...
Quelques brèves remarques toutefois.
1/ Bruckner a l'honneur d'appartenir au minuscule club des intellectuels
français ayant reconnu aux Américains le droit de se défendre de leurs
ennemis, et aux Iraquiens celui d'être libéré de Saddam Hussein. Or voici
que maintenant il écrit : "la faillite de George W. Bush et de Tony Blair
dans leurs guerres contre la terreur vient aussi de ce qu'ils ont privilégié
le terrain militaire au détriment du débat d'idées". Je ne pense pas que ce
soit exact : s'il est vrai, et Ludovic Monnerat l'a souvent rappelé, que la
guerre contre la terreur se jouait également sur ce terrain
(www.ludovicmonnerat.com/), on peut difficilement nier que l'Iraq et
l'Afghanistan disposent désormais des Constitutions les plus progressistes
et tolérantes de tout le monde arabo-musulman, avec des gouvernement d'union
nationale qui sont nos alliés dans la guerre contre la terreur, même si
effectivement les éléments les plus libéraux (le parti d'Allaoui par ex.)
sont désormais minoritaires par rapport aux religieux. Mais que faire ?
Doit-on menacer d'abandonner Maliki chaque fois qu'il prend telle ou telle
décision que nous jugeons opportune, bref ligoter ce gouvernement à la
manière de ce que fût le Japon pendant des décennies ? Il s'agirait alors
d'une bien étrange conception de la souveraineté nationale du peuple
iraquien...
2/ Une des critiques de Ian Buruma me semble recevable : appartient-il à la
puissance publique de définir le "bon dogme" ? La laïcité à la française,
c'est-à-dire laïcité de combat, n'est-elle pas un travers de l'idéologie
républicaniste française ?
"Here we may indeed have stumbled on a cultural difference. In a
peculiar fit of GALLIC CHAUVINISM, Bruckner declares "the superiority of the
French model." There is something quaintly old-fashioned, and even
refreshing, about this kind of national pride. But what is it that Bruckner
finds so superior? Laicité, I suppose, and republicanism. I would
immediately concede that there is much to be admired about France, and its
"model". However, Bruckner's notion that the state should get involved in
dogmas, or the interpretation of holy scriptures, may have some bearing on
the history of post-revolutionary France. In any case, I think it is a bad
idea. There are many reasons why it would be desirable for Muslims, or
anybody else, to feel free to reinterpret their religious texts, and for all
of us to challenge dogmas. But this surely is not the business of the state,
for that opens the way to authoritarianism."
3/ Il est regrettable que tant d'auteurs intelligents cherchent encore
absolument à distinguer "islam modéré" et "islam intégriste". On peut certes
rêver d'un "islam des Lumières". Fort bien. Mais c'est une aberration
conceptuelle pour qui a lu les sourates du saint Coran. Lisez donc la
contribution de Necla Kelek (http://www.signandsight.com/features/1173.html)
"Islam is a social reality. Despite all differences of detail, in its
writings and its philosophy it constitutes a cohesive view of mankind and
the world. Let us look at the question of human rights and women's rights,
for example. In those areas, MUSLIMS ARE VERY UNITED indeed. On August 5,
1990, 45 foreign ministers of the Organisation of the Islamic Conference,
the highest international secular body in the Muslim world, signed "The
CAIRO DECLARATION ON HUMAN RIGHTS IN ISLAM." In that document
(http://www.religlaw.org/interdocs/docs/cairohrislam1990.htm), Muslims from
around the world expressed their common attitudes towards human rights. It
was intended as an appendix to the UN's Universal Declaration of Human
Rights. The Cairo Declaration is not binding under international law, but it
illuminates the global attitude of Islam with respect to fundamental rights.
The fact that it constitutes a minimal consensus, rather than an extreme
view, makes it all the more illuminating.
"The most important statements of this document are to be found in its
two final articles:
"Article 24: "All the rights and freedoms stipulated in this Declaration
are subject to the Islamic Sharia."
"Article 25: "The Islamic Sharia is the only source of reference for the
explanation or clarification [of] any of the articles of this Declaration."
"And in contrast to the UN Declaration, the Cairo Declaration's preamble
states that the members of the Organisation of the Islamic Conference
reaffirm "the civilizing and historical role of the Islamic Ummah, which God
made the best nation that has given mankind a universal and well-balanced
civilisation..."
"Unlike in democratic constitutions, there is no talk here of the
individual, but rather of the UMMAH, the Community of the Faithful, the
collective. As a logical consequence, the Cairo Declaration acknowledges
only those rights specified in the Koran and, in keeping with SHARIA,
regards only those acts so judged by both the Koran and the Sunnah to be
criminal.[...]"
4/ Il est enfin dommage qu'aujourd'hui, la résistance à l'islam soit
essentiellement le fait de personnages-repoussoir, comme la clique
anticléricale bête et méchante de Charlie-Hebdo, le communiste Robert
Redeker ou encore la lesbienne Caroline Fourest
(http://carolinefourest.canalblog.com/), dont les propos excellents sur
l'islam, les "indigènes de la république" ou Tariq Ramadan se trouvent un
peu décrédibilisés par un égal acharnement à mettre toutes les religions - y
compris juive et chrétienne - dans un même sac (ou à traiter d'homophobe
quiconque ne serait pas sur la même ligne que son lobby gay).
-----
=> Bruckner :
"[...] This vicious mechanism is well known. Those who revolt against
barbarism are themselves accused of being barbarians. [...] The entire
history of the 20th century attests to the fanaticism of modernity. [...]
Today we are heirs to both movements, and understand how to reconcile the
particularity of national, linguistic and cultural ties with the
universality of the human race. Modernity has been self-critical and
suspicious of its own ideals for a long time now, denouncing the
sacralisation of an insane reason that was blind to its own zeal. In a word,
it acquired a certain wisdom and an understanding of its limits. The
Enlightenment, in turn, showed itself capable of reviewing its mistakes.
Denouncing the excesses of the Enlightenment in the concepts that it forged
means being true to its spirit. These concepts are part and parcel of the
contemporary make up, to the point that even religious fanatics make use of
them to promote their cause. Whether we like it or not, we are the sons of
this controversial century, compelled to damn our fathers in the language
they bequeathed to us. And since the Enlightenment triumphed even over its
worst enemies, there is no doubt that it will also strike down the Islamist
hydra, provided it believes in itself and abstains from condemning the rare
reformers of Islam to the darkness of reprobation.
"TODAY WE CONBINE TWO CONCEPTS OF LIBERTY: ONE HAS ITS ORIGINS IN THE
18TH CENTURY, FOUNDED ON EMANCIPATION FROM TRADITION AND ANTHORITY. THE
OTHER, ORIGINATING IN ANTI-IMPERIALIST ANTHROPOLOGY, IS BASED ON THE EQUAL
DIGNITY OF CULTURES which could not be evaluated merely on the basis of our
criteria. RELATIVISM demands that we see our values simply as the beliefs of
the particular tribe we call the West. MULTICULTURALISM is the result of
this process. [...]
"Anyone with a mind to contend timidly that liberty is indivisible, that
the life of a human being has the same value everywhere, that amputating a
thief's hand or stoning an adulteress is intolerable everywhere, is duly
arraigned in the name of the necessary equality of cultures. As a result, we
can turn a blind eye to how others live and suffer once they've been parked
in the ghetto of their particularity. Enthusing about their INVIOLABLE
DIFFERENTNESS alleviates us from having to worry about their condition.
However it is one thing to recognise the convictions and rites of fellow
citizens of different origins, and another to give one's blessing to hostile
insular communities that throw up ramparts between themselves and the rest
of society. How can we bless this difference if it excludes humanity instead
of welcoming it? This is the PARADOX OF MULTICULTURALISM: it accords the
same treatment to all communities, but not to the people who form them,
denying them the freedom to liberate themselves from their own traditions.
Instead: recognition of the group, oppression of the individual. The past is
valued over the wills of those who wish to leave custom and the family
behind and - for example - love in the manner they see fit.[...]
"Yet fostering an enlightened European Islam is capital: EUROPE MAY
BECOME A MODEL [...]
"IT IS TIME TO EXTEND OUR SOLIDARITY TO ALL THE REBELS OF THE ISLAMIC
WORLD, non-believers, atheist libertines, dissenters, sentinels of liberty,
AS WE SUPPORTED EASTERN DISSIDENTS IN FORMER TIMES. Europe should encourage
these diverse voices and give them FINANCIEAL, MORAL AND POLITICAL SUPPORT.
[...]
"It is astonishing that 62 years after the fall of the Third Reich and
16 years after the fall of the Berlin Wall, AN IMPORTANT SEGMENT EUROPE'S
INTELLIGENTSIA IS ENGAGED IN SLANDERING THE FRIENDS OF DEMOCRACY. They
maintain it is best to cede and retreat, and pay mere lip-service to the
ideals of the Enlightenment. Yet we are a long way off the dramatic
circumstances of the 1930s, when the best minds threw themselves into the
arms of Berlin or Moscow in the name of race, class or the Revolution. Today
the threat is more diffuse and fragmented. There is nothing that resembles
the formidable peril of the Third Reich. Even the government of Mullahs in
Tehran is a paper tiger that could be brought to its knees with a minimum
dose of rigour. Nevertheless the preachers of panic abound. Kant defined the
Enlightenment with the motto: Sapere aude - dare to know. A culture of
courage is perhaps what is most lacking among today's directors of
conscience. They are the symptoms of a fatigued, self-doubting Europe, one
that is only too ready to acquiesce at the slightest alarm. Yet their
good-willed rhetorical molasses covers a different tune: that of
capitulation!"
* Pascal Bruckner, En finir avec le multiculturalisme,
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-***@2-3232,36-869025,0.html
"LES ENNEMIS DE LA LIBERTE SE RECRUTENT D'ABORD DANS LES SOCIETES
LIBRES, chez une partie des élites éclairées qui dénient le bénéfice des
droits démocratiques au reste de l'humanité, voire à leurs compatriotes, si
ceux-ci ont le malheur d'appartenir à une autre religion, à une autre
ethnie. Il suffit pour s'en convaincre de lire deux écrits récents, le livre
d'Ian Buruma On a tué Theo Van Gogh (Flammarion, 2006) et la critique de ce
même livre par le journaliste et universitaire anglais Timothy Garton Ash
parue dans le New York Review of Books.
"Ian Buruma cache mal son agacement pour l'engagement de la députée
néerlandaise d'origine somalienne Ayaan Hirsi Ali, amie de Theo Van Gogh,
elle-même condamnée à mort et dont la critique du Coran l'embarrasse.
Timothy Garton Ash est plus brutal encore : pour lui, apôtre du
multiculturalisme, l'attitude d'Ayaan Hirsi Ali est à la fois irresponsable
et contre-productive. Son verdict est implacable : "Ayaan Hirsi Ali est
aujourd'hui une courageuse et légèrement simpliste fondamentaliste des
Lumières."
[...] "Ian Buruma, non sans perfidie, dénie à Ayaan Hirsi Ali le droit
de se référer à Voltaire : celui-ci aurait affronté l'une des institutions
les plus puissantes de son temps, l'Eglise catholique, quand elle se
contente d'offenser "une minorité vulnérable au coeur de l'Europe". C'est
oublier que l'islam n'a pas de frontières : les communautés musulmanes du
Vieux Monde qui s'adossent sur plus d'un milliard de croyants, traversés de
courants divers, peuvent devenir l'aile avancée d'une offensive intégriste
ou donner au contraire l'exemple d'une religiosité plus conforme à la
mesure. Ce n'est pas une mince affaire, c'est même l'un des enjeux majeurs
du XXIe siècle !
"Isolée, promise à l'égorgement par les radicaux, contrainte de vivre
entourée de gardes du corps, Ayaan Hirsi Ali doit en plus subir, comme
Robert Redeker, ce professeur de philosophie français menacé de mort par des
sites islamistes, les sarcasmes des grands esprits et des donneurs de leçon.
Les défenseurs de la liberté seraient donc des fascistes, tandis que les
fanatiques sont dépeints comme des victimes !
"On oublie qu'il existe un despotisme des minorités rétives à l'assimilation
si elle ne s'accompagne pas d'un statut d'extraterritorialité, de
dérogations spéciales. On leur refuse ce qui a été notre privilège : le
passage d'un monde à un autre, de la tradition à la modernité, de l'obéissance
aveugle à la décision raisonnée. La protection des minorités implique aussi
le droit pour les individus qui en font partie de s'en retirer sans dommage,
par l'indifférence, l'athéisme, le mariage mixte, l'oubli des solidarités
claniques ou familiales, de se forger un destin qui leur soit propre sans
reproduire ce que leurs parents leur avaient légué. La minorité ethnique,
sexuelle, religieuse, régionale n'est souvent rien d'autre, en raison des
offenses subies, qu'une petite nation rendue à son angélisme, chez qui le
chauvinisme le plus outrancier n'est que l'expression d'un légitime
amour-propre. Le chantage à la solidarité ethnique, religieuse, raciale, la
dénonciation des apostats, des félons, des "bougnoules de service", des
"Oncle Tom" et autres "Bounty" servent de rappel à l'ordre pour les
récalcitrants éventuels et brisent leur aspiration à l'autonomie.
"Il n'est donc pas surprenant que la réprimande de nos intellectuels s'exerce
à l'endroit d'une Ayaan Hirsi Ali. Rien ne manque au tableau que Timothy
Garton Ash dresse de la jeune femme, pas même un machisme suranné : seule la
beauté de la parlementaire hollandaise, son côté glamour expliqueraient,
selon lui, son succès médiatique et non la justesse de ses attaques. Timothy
Garton Ash ne se demande pas si l'islamologue Tarik Ramadan auquel il
adresse des dithyrambes enflammés ne doit pas lui aussi sa renommée à son
physique de play-boy. Ayaan Hirsi Ali, il est vrai, déjoue les stéréotypes
du politiquement correct en cours : Somalienne, elle proclame la supériorité
de l'Europe sur cette région de l'Afrique ; femme, elle échappe au destin d'épouse
et de mère ; musulmane, elle dénonce ouvertement l'arriération du Coran.
Autant de clichés bafoués qui font d'elle une insoumise et non une de ces
insurgées en toc comme nos sociétés en produisent à la pelle.
"Les Lumières appartiennent au genre humain tout entier et non à
quelques privilégiés nés en Europe ou en Amérique du Nord, qui se permettent
en plus de les piétiner comme des enfants gâtés, d'en refuser la jouissance
aux autres. S'il est un multiculturalisme légitime tant qu'il reste modéré,
sa version anglo-saxonne n'est peut-être rien d'autre qu'un apartheid légal
où l'on retrouve les accents attendris des riches expliquant aux pauvres que
l'argent ne fait pas le bonheur : à nous les fardeaux de la liberté, de l'invention
de soi, de l'égalité entre les sexes, à vous les joies de l'archaïsme, des
abus reconvertis sous le beau nom de coutumes ancestrales, le mariage forcé,
le voile, la polygamie. [...]
"Les faits sont cruels pour les temporisateurs qui enjoignent l'Europe
de se plier à l'islam plutôt que l'islam à la civilisation européenne : PLUS
ON CEDE AU RADICALISME DES BARBUS, PLUS ILS DURCISSENT LE TON.
"A dire vrai, les positions d'Ian Buruma et de Timothy Garton Ash sont
dans la droite ligne de leurs gouvernements américain et britannique (même s'ils
les désapprouvent politiquement) : la faillite de George W. Bush et de Tony
Blair dans leurs guerres contre la terreur vient aussi de ce qu'ils ont
privilégié le terrain militaire au détriment du débat d'idées.
"Or la mobilisation en faveur d'un islam européen éclairé est capitale :
L'EUROPE PEUT DEVENIR UN MODELE, UN FOYER DE RAYONNEMENT POUR LA REFORME DE
CE MONOTHEISME DONT ON ESPERE QU'IL SERA GAGNE UN JOUR, A L'EXEMPLE DE
VATICAN II POUR LES CATHOLIQUES, PAR L'AUTOCRITIQUE ET L'EXAMEN DE
CONSCIENCE. ENCORE FAUT-IL NE PAS SE TROMPER D'INTERLOCUTEURS, ERIGER EN
AMIS DE LA TOLERANCE DES FONDAMENTALISTES QUI USENT DE LA DISSIMULATION,
INVESTISSENT LA GAUCHE ET L'INTELLIGENTSIA POUR AVANCER LEURS PIONS ET
S'EPARGNER L'EPREUVE DE LA LAICITE."