Post by François GuilletPour l'accélération d'une seule charge, je t'ai donné l'expression exacte
du champ, il est composé d'un champ radial qui décroit en 1/r^2 et d'un
champ parallèle à l'accélération qui décroit en 1/r.
Le livre de Feynman se contente d'asséner la formule et de la discuter un
peu. Il y a une discussion infiniment plus approfondie (et la déduction de
cette formule) dans le meilleur livre d'électrodynamique classique, J.D.
Jackson Classical Electrodynamics. On en trouve le pdf sur le web au
premier clic. Il s'agit du chapitre
Radiation by moving charges pp. 464-504. En particulier il y a la
discussion des limites basse vitesse, très haute vitesse, etc. Jackson
était spécialiste des accélérateurs de particules, donc c'est un sujet
qu'il connaît à fond. Tu y verras que B est toujours perpendiculaire à E
et dans quel cas on peut se ramener à la discussion des ondes planes.
Par contre c'est trapu en calcul.
La question du rayonnement est extrêmement complexe aussi bien sur le plan
conceptuel que sur le plan mathématiques. Je n'ai jamais rencontré de
physicien capable de comprendre l'origine profonde d'un champ qui rayonne en
1/r en opposition avec le champ Coulombien qui décroit en 1/r^2.
L'explication du rayonnement est de nature géométrique, cela vient du fait
que dans l'espace-temps de Minkowski tout objet physique qui possède un
gradient stationnaire dans un référentiel est perçu comme une onde
propagative dans un autre référentiel.
Donc si une force est décrite par le gradient d'un "potentiel qui décroit en
1/r" comme la force électrostatique qui au final décroit en 1/r^2, dans un
autre référentiel la même force doit être décrite par la variation temporelle
de ce même potentiel, et cette fois la décroissance est en 1/r. C'est ce que
j'expliquais à Guillet sur l'exemple de la charge dans une fusée accélérée,
dans le référentiel de la fusée le champ est Coulombien mais dans un
référentiel galiléen le champ rayonne en 1/r. Tout ceci est devenu
parfaitement clair pour moi, mais ça m'a pris beaucoup de temps pour le
comprendre.
Ok. Il reste la nécessité de se mettre d'accord sur ce que tu mets dans
le terme "rayonnement".
Le problème de l'énergie n'est pas résolu, et les limites quantiques.
Suppose un rayonnement EM généré de façon classique dans le vide, par
exemple par un émetteur radio. Un observateur inertiel va recevoir une
certaine quantité d'énergie quantifiée en h*ν. Si ν->0, l'énergie à la
limite est nulle. C'est ce qui se passe si la source est une charge à
accélération constante. Or un rayonnement est par définition un
processus de propagation d'énergie. S'il n'y a pas transmission
d'énergie, il n'y a pas rayonnement pour cet observateur, donc pour
aucun observateur inertiel. Tu observes un champ statique de même
nature qu'un champ statique coulombien.
C'est que tu sembles aussi appeler "rayonnement" ce qu'observe un
observateur en déplacement accéléré par rapport à une charge, elle dans
un référentiel inertiel. Mais dans ce cas l'énergie apparente sera
prise à l'observateur, tandis que dans le cas classique, elle est prise
au processus d'accélération de la charge. Dans le premier cas c'est
l'observateur qui rayonne, pas la charge.
Tu peux clarifier ?
Avant de clarifier, un petit rappel d'électromagnétisme s'impose afin de
ne pas perdre les lecteurs dans l'interprétation de l'expérience de
pensée qui va suivre.
Rappelons que les équations de Maxwell qui forment un système covariant
sous une transformation de Lorentz ne sont valides que dans un
référentiel inertiel. Dans un référentiel accéléré, ou dans un
champ de gravitation les équations de Maxwell ne sont pas rigoureusement
applicables, néanmoins sans utiliser les outils tensoriels de la
relativité générale il est possible de calculer les champs dans les
référentiels accélérés en se référant aux référentiels inertiels
tangents.
La solution explicite des champs E et B à partir des potentiels est
indépendante du référentiel, qu'il soit accéléré ou non. On a E =
-grad V - dA/dt et B = rot A.
Supposons deux observateurs qui se croisent, ils ont la même vitesse,
mais le premier est un référentiel accéléré (appelons le observateur
1) et le second a un mouvement de translation uniforme (appelons le
observateur 2).
Nous pouvons construire une expérience de pensée montrant que la donnée
des champs E et B dans le référentiel galiléen ne constitue pas une
information suffisante pour calculer les champs dans le référentiel
accéléré, en effet il est possible de construire une situation à
travers laquelle E et B sont nuls dans le référentiel galiléen mais non
nuls dans le référentiel accélérés. La connaissance de E et B dans un
domaine étendu de l'espace ne permet pas de caractériser complètement
les sources qui génèrent ces champs car les sources peuvent être
localisées à l'extérieur du domaine. En revanche, la connaissance
locale du potentiel V et du potentiel vecteur A caractérisent à 100% les
champs puisqu'ils en sont la dérivation.
Examinons la situation d'une coquille sphérique au repos de grande
dimension et uniformément chargée. Pour tout observateur au repos situé
à l'intérieur de la coquille nous savons que le champ électrique est
parfaitement nul, peu importe sa position.
On a donc E = 0 et B = 0 dans toute la coquille.
Voyons à présent ce qui se passe pour un observateur situé à
l'intérieur de la coquille mais en translation rectiligne et uniforme par
rapport à la coquille. Pour connaitre les champs E' et B' mesurés par
cet observateur il suffit d'appliquer la transformation relativiste des
champs entre les deux référentiels (voir ici
https://fr.wikipedia.org/wiki/Transformations_de_Lorentz_du_champ_%C3%A9lectromagn%C3%A9tique).
Les transformations entre E et B étant linéaires, si E=0 et B=0, alors
E'=0 et B'=0.
On en déduit le résultat très intéressant, que tout observateur en
mouvement de translation rectiligne et uniforme situé à l'intérieur de
la coquille ne détectera aucun champ.
On voit bien par cet exemple que la connaissance des champs E et B par un
observateur ne lui permet pas de caractériser les sources qui génèrent
ces champs.
Supposons à présent que nous déchargeons la coquille, les champs
restent nuls à l'intérieur, la situation étant pour autant équivalente
à la situation où la coquille était chargée. Nous allons voir par la
suite que la réponse est négative.
Revenons aux observateurs 1 et 2, s'ils connaissent la distribution des
sources rho et j, ils pourront en déduire par le calcul les potentiels
(V,A) et comme les potentiels ne dépendent pas de l'accélération des
sources, les deux observateurs auront la bonne surprise de constater que
au moment précis du croisement, s'ils se mettent d'accord sur un choix de
jauge pour calculer les potentiels, alors ils trouveront exactement les
mêmes valeurs. Il n'en sera pas de même pour les champs E et B, car à
l'instant d'après il y a désaccord sur le calcul de A, en effet
l'observateur 1 ayant accéléré il y a désaccord sur la vitesse des
sources et donc sur la dérivée temporelle du potentiel vecteur A. Pour
l'observateur galiléen, V a une valeur non nulle mais uniforme, et le
potentiel vecteur A ne varie pas dans le temps. Pour l'observateur
accéléré les choses sont complètement différentes, son potentiel
vecteur A est linéairement croissant car proportionnel à la vitesse
croissante de la coquille dans son propre référentiel, en revanche au
moment du croisement les deux observateurs calculent le même potentiel
V(x,y,z) et donc le même gradient. Pour l'observateur accéléré, dA/dt
est non nul il devrait donc apparaitre de son point de vue un champ
électrique non nul.
Pour cet observateur accéléré, la coquille rayonne, et si cet
observateur est lui même chargé il constatera que le champ électrique
est directement proportionnel à son accélération et produit une force
de freinage qui s'oppose à son, accélération, comme si son inertie
était augmentée.
Où part cette énergie? Réponse : dans le rayonnement.