Post by JVBAu delà des articles et des commentaires stupéfiants de bêtise dans les
médias, en particulier sur "les dangers de la remise de gaz"..
Remise de gaz, parlons-en !
Passager, vous êtes sanglé sur votre siège, vous avez relevé votre
tablette, rangé vos affaires, vous regardez par le hublot pour
apercevoir la piste et, mentalement, vous vous apprêtez à « noter » la
qualité de la prise de sol.
Hôtesse ou Steward, vous êtes sanglé tranquille sur votre siège
structure, comme demandé par la voix du Captain au public-adress : « PNC
préparez-vous pour l'atterrissage ».
Et boum ! En une ou deux secondes, vous sentez que ça repart plein gaz,
vous entendez le train rentrer, l'avion remonte... C'est reparti pour un
tour. Les passagers se cramponnent et ouvrent un œil interrogateur.
C'est une remise de gaz. C'est relativement rare, mais ça arrive, et
sûr, vu de l'arrière de l'avion, c'est assez impressionnant.
Tout d'abord, rassurons-nous, une remise de gaz est une manœuvre de
sécurité. Elle est pleinement décidée et effectuée par les pilotes,
lorsque pour une raison ou une autre, ils ne peuvent pas terminer
l'atterrissage en toute sérénité.
On peut même aller jusqu'à dire qu'il s'agit d'une manœuvre normale.
Lors du briefing approche, le pilote aux commandes décrit son projet
d'action en détaillant les points clés de l'approche, puis de la remise
de gaz, (comme s'il s'agissait de l'aboutissement normal de l'approche),
pour enfin conclure que finalement, si tout se présente bien, on pourra
envisager de se poser. C'est une bonne méthode pour dédramatiser la
décision de remise de gaz et ne pas hésiter à l'engager lorsque cela est
utile.
Pourquoi remettre les gaz ?
Un des pilotes a peut-être jugé que l'atterrissage ne se présentait pas
sous toutes les conditions favorables. Un peu trop vite, peut-être, un
peu trop haut sur le plan de descente, un vent autre que celui attendu,
que sais-je ? Ou alors, la piste était occupée.
Réglementairement, on ne peut se poser, à quelques exceptions près, que
lorsque l'avion précédent a dégagé la piste, ou fini de décoller,
suivant le cas. Et la remise de gaz pour piste occupée guette le pilote
à chaque étape, sur les aéroports de plus en plus encombrés.
Nombre de pilotes ont déjà remis les gaz parce qu'un animal divaguait
sur la piste, chevreuil, chien, sanglier, ou qu'une voiture s'y trouvait
par erreur. On peut aussi remettre les gaz à cause de la météo. Chaque
fois que l'on effectue une approche, elle implique des minima,
c'est-à-dire qu'à une certaine hauteur, on doit voir la piste, pour
terminer l'atterrissage à vue. Si à la hauteur dite, on ne voit pas
dehors, c'est la remise de gaz, car l'atterrissage en toute sécurité ne
serait pas garanti. Dans ce cas-là, après la remise de gaz, on va
réfléchir à la suite des événements, nouvelle approche avec d'autres
moyens radio, attente, déroutement, etc. Notons enfin qu'une remise de
gaz est possible très tard, même une fois que l'avion a touché le sol,
et que nos machines ont la capacité de redécoller quasi instantanément
lorsqu'on applique la pleine poussée, si le pilote le juge nécessaire.
La remise de gaz est prévue dans les manuels d'utilisation de tous les
avions. Elle consiste initialement en deux actions :
- Donner à l'avion une assiette de montée (en clair, on cabre).
- Appliquer la poussée décollage sur les moteurs.
Dès cet instant, l'avion est dans une logique de décollage, le même
décollage que l'on vit tous les jours. Dans quelques instants, on va
donc rentrer le train et les volets. Ça va faire du bruit, tout le monde
va l'entendre. Mais, répétons-le, c'est une séquence normale.
Comment ça se passe ?
On remet les gaz pour éloigner l'avion du sol le plus vite possible,
utilisant à ce moment-là presque toute la puissance de l'avion, même
s'il n'y a aucune urgence. Ceci explique parfois l'apparente brutalité
de la manœuvre. Un avion est fait pour voler et, tel l'albatros, il se
trouve bien plus à l'aise en vol qu'au sol où les manœuvres de roulage
le révèlent lourd et pataud. Alors, vite, allons réfléchir en altitude !
Dans la minute qui suit, les pilotes auront fort à faire et ne pourront
pratiquement pas vous parler, car ils auront à gérer les mêmes charges
de travail que lors d'un décollage, ils suivent les accélérations de la
machine, pressée de rejoindre son lieu de jeu favori, le ciel. Voilà,
légère réduction du bruit des moteurs, puis rentrée des volets et
accélération, comme d'habitude.
Dans quelques instants, notre CDB prendra le micro pour nous donner les
raisons de cette approche interrompue, les passagers comprendront que
tout ça n'a rien d'inquiétant.
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Peut-être que si l'on donnait aux passagers des brochures comme celles
qui étaient distribuées sur les Constel's :
Long courriers du ciel - Ce qu'il faut savoir quand on voyage en avion
http://aviatechno.net/constellation/long_courriers/vignettes.php
toutes ces procédures seraient démystifiées
--
Aujourd'hui, l'idéal du progrès est remplacé par l'idéal de l'innovation :
il ne s'agit pas que ce soit mieux, il s'agit seulement que ce soit nouveau,
même si c'est pire qu'avant et cela de toute évidence. Montherlant
Technologie aéronautique - http://aviatechno.net - Les anciens de Vilgénis