Post by YannixPost by Cl.MasséPost by Yannix... Parce qu'au fait, tout le monde sait bien que le brousouf ne peut
pas marcher en l'état. Pierre-Gilles de Gennes et Georges Charpak
l'ont déjà dit. Mais bon, continuons, ça coûterait trop cher d'arrêter
maintenant ! :-/
Et Laplace a dit, c'est la fin de la physique, on n'a plus besoin que de
calculateurs, alors…
http://www.liberation.fr/sciences/2010/08/10/nucleaire-arretons-iter-ce-reacte
ur-hors-de-prix-et-inutilisable_671121
"Par Georges CHARPAK, Prix Nobel de physique , Jacques Treiner,
Professeur émérite à l?université Pierre-et-Marie-Curie, Paris et
Sébastien Balibar, Directeur de recherche au CNRS, Ecole normale
supérieure, Paris — 10 août 2010 à 00:00"
" Ce que nous craignions est donc en train de se produire : le coût
prévisionnel de construction d'Iter venant de passer de 5 à 15 milliards
d'euros, il est question d'en faire subir les conséquences aux budgets
de financement de la recherche scientifique européenne. C'est exactement
la catastrophe que nous redoutions. Il est grand temps d'y renoncer.
Iter est le réacteur expérimental que sept pays ont décidé de construire
à Cadarache (en Provence) afin de tester la possibilité de produire de
l'électricité à partir de la fusion nucléaire. Ces pays sont les
Etats-Unis, l'Europe, la Russie, la Corée du Sud, le Japon, la Chine et
l'Inde. La revue Nature du 1er juillet 2010 nous apprenait que la
contribution européenne devait passer de 2,7 à 7,2 milliards d'euros,
dont 1,4 milliard à trouver en 2012-2013 sur le budget du Septième plan
de la recherche européenne. L'Europe s'est en fait engagée pour 6,5
milliards d'euros fin juillet. Pour la France, la dépense représentera
plus que l'ensemble des crédits (hors salaires) dont disposent tous les
laboratoires de physique et de biologie pendant vingt ans ! De
nombreuses recherches autrement plus importantes, y compris pour
l'avenir énergétique de notre planète, sont ainsi menacées. Pourquoi
plus importantes ?
Contrôler la fusion pour produire de l'électricité est un rêve ancien.
Mais, contrairement à la fission qui permit rapidement de construire nos
centrales nucléaires actuelles, la fusion pose des problèmes que, depuis
plus de 50 ans, on ne sait pas résoudre. Résumons : la méthode consiste
à chauffer un mélange d'hydrogène lourd (un plasma de deutérium et de
tritium) jusqu'à 100 millions de degrés en l'accélérant dans une
enceinte en forme d'anneau. A une telle température, ces noyaux
fusionnent, en dégageant une énergie colossale. C'est l'énergie libérée
par les bombes H, mais Iter n'est pas dangereux car les quantités
d'hydrogène sont très petites.
Pour contrôler cette production d'énergie, trois difficultés majeures
doivent être surmontées: maintenir le plasma à l'intérieur de l'enceinte
(il est instable), produire le tritium en quantités industrielles et
inventer des matériaux pour enfermer ce plasma sous ultravide dans une
enceinte de quelques milliers de mètres cubes. C'est seulement à partir
de 2019 qu'Iter doit commencer à étudier la première de ces difficultés.
Or il nous semble que la plus redoutable en est la troisième: violemment
irradiés par les neutrons très énergétiques (14 MeV) émis par la fusion
du plasma, les matériaux de l'enceinte perdent leur tenue mécanique. On
a beau nous dire qu'on pourra imaginer des matériaux qui résisteront à
l'irradiation parce qu'ils seront à la fois étanches et poreux, nous
sommes pour le moins sceptiques : étanches et poreux, n'est-ce pas
contradictoire ? Personne, à ce jour, n'a réussi à prouver le contraire.
Autant dire qu'on est loin de la mise au point d'un prototype de
centrale électrique, puis d'une tête de série commerciale, enfin de
l'avènement d'une nouvelle filière de production d'énergie. Ponctionner
d'autres projets de recherche au prétexte qu'il y aurait là une source
quasi infinie d'énergie n'est donc aucunement justifié. La physique des
plasmas doit être financée au même titre que les autres grands domaines
de recherche fondamentale, pas au-delà.
Or notre problème d'énergie est urgent. C'est immédiatement qu'il faut
économiser l'énergie, et remplacer les combustibles fossiles (pétrole,
gaz et charbon), responsables du réchauffement climatique, par de
l'énergie propre. La seule source massive d'énergie ne dégageant pas de
gaz carbonique est la fission à l'œuvre dans nos centrales nucléaires
actuelles. On sait qu'elle deviendra durable lorsqu'on passera à la 4e
génération de centrales (G-IV), laquelle transformera les déchets
actuels en combustible et fournira ainsi de l'énergie propre pour au
moins cinq mille ans. Superphénix en était un prototype. Après quelques
problèmes techniques inévitables pour un prototype, et malgré de très
nombreux problèmes administratifs puis politiques, Superphénix a
remarquablement fonctionné pendant un an. Sa fermeture en 1998 résulta
d'une exigence des Verts de Dominique Voynet, pour participer au
gouvernement Jospin.
Au lieu d'investir dans Iter, la communauté internationale et surtout
l'Europe feraient mieux de reconstruire une centrale de type G-IV afin
d'améliorer ce que Superphénix nous a déjà appris. On pourrait aussi
accélérer la recherche sur d'autres centrales G-IV, dites «à sels
fondus». Elles utiliseront du thorium, un élément abondant et dont
l'utilisation pose moins de problèmes de prolifération que l'uranium et
le plutonium de la filière actuelle. Aujourd'hui, malheureusement,
Euratom n'est clairement missionné que sur la fusion. A l'échelle
mondiale, bien qu'il soit difficile d'obtenir des chiffres précis, les
crédits de recherche concernant G-IV sont environ dix fois moins
importants que ceux alloués à Iter. Les seuls pays qui construisent des
centrales de ce type sont les Russes, les Japonais et les Indiens. En
cette période de crise économique où la recherche de solutions propres
et durables au réchauffement climatique est urgente, il est
indispensable d'orienter les fonds publics disponibles vers les vraies
priorités. On nous dit qu'Iter étant engagé, cela coûterait très cher de
l'arrêter. Cet argument n'est pas satisfaisant. La construction n'est
pas commencée, seul le terrain est aménagé.
Si l'on continue, tous les secteurs de la recherche vont souffrir. Cette
situation rappelle la construction de la Station spatiale
internationale, l'ISS. Autre projet pharaonique, l'ISS a coûté 100
milliards de dollars et nos collègues astrophysiciens se souviennent
encore des coupes budgétaires que sa construction a entraînées. Or, à
quoi a servi l'ISS ? Pratiquement à rien. Pour observer la Terre ou
l'Univers, il vaut mieux envoyer en orbite des robots qui sont plus
stables et moins chers. En fait, les astronautes s'ennuient là-haut. Ils
passent donc leur temps à étudier leur propre santé ! Iter risque d'être
comparable : si elle est construite, cette grosse machine ne servira
qu'à étudier la stabilité du plasma d'Iter. 15 milliards d'euros pour
cela, n'est-ce pas un peu cher ? D'autant que, d'ici 2019, ce coût
risque d'être réévalué…
Alors, plutôt que de masquer une mauvaise décision initiale par une
escalade plus mauvaise encore, mieux vaudrait admettre enfin que le
gigantisme du projet est disproportionné par rapport aux espérances, que
sa gestion apparaît déficiente, que nos budgets ne nous permettent pas
de le poursuivre, et transférer cet argent vers de la recherche utile."
X.
mainiere ça aurait été un jour ou l'autre...